En mai 2025, l’euro a franchi la barre des 260 dinars sur le marché noir en Algérie, suscitant des inquiétudes quant à la stabilité économique du pays. Cette envolée résulte de facteurs économiques légitimes et de pratiques illégales, notamment le blanchiment d’argent. Cet article examine les causes de cette flambée et les mesures envisagées pour y remédier.
Demande légitime de devises : voyages, études et santé
La demande croissante de devises pour des besoins légitimes tels que les voyages touristiques, les études à l’étranger et les soins médicaux contribue à la pression sur le marché parallèle. Les restrictions sur l’accès aux devises via les canaux officiels poussent les citoyens à se tourner vers le marché noir pour satisfaire leurs besoins. L’augmentation de l’allocation touristique à 750 euros par adulte, annoncée par le gouvernement, vise à répondre à cette demande légitime et à réduire la dépendance au marché informel.
Cependant, la mise en œuvre de cette mesure a été retardée, les modalités d’octroi n’ayant pas encore été fixées par la Banque d’Algérie. Ce retard alimente l’incertitude et maintient la pression sur le marché parallèle, où les taux de change restent élevés.
Blanchiment d’argent et économie informelle : des facteurs aggravants
Outre la demande légitime, le marché noir des devises est alimenté par des pratiques illégales telles que le blanchiment d’argent issu de la corruption, du trafic de drogue et de l’économie informelle. Les restrictions sur les transactions en espèces, notamment dans l’immobilier, ont poussé les détenteurs de fonds illicites à convertir leurs dinars en devises, plus faciles à stocker et à transférer. Cette conversion massive contribue à la flambée des devises sur le marché parallèle .
Le gouvernement a tenté de contrer ces pratiques en imposant des restrictions sur les transferts de devises à l’étranger, limitant ces derniers à un montant annuel de 7 500 euros par individu. Cette mesure vise à freiner la sortie incontrôlée de capitaux et à maintenir une certaine stabilité dans les réserves de devises étrangères .
Retard dans l’application de l’allocation touristique : un frein à la régulation
L’augmentation de l’allocation touristique à 750 euros par adulte, annoncée pour janvier 2025, devait réduire la dépendance des Algériens au marché noir. Cependant, l’absence de mise en œuvre effective de cette mesure, en raison du retard dans la publication des textes d’application, a maintenu la pression sur le marché parallèle. Les citoyens, dans l’attente de cette allocation, continuent de se tourner vers les cambistes pour obtenir des devises, alimentant ainsi la flambée des taux de change .
La Banque d’Algérie prévoit de publier prochainement l’instruction fixant les modalités d’octroi de cette allocation. Une fois mise en œuvre, cette mesure pourrait contribuer à réduire la demande sur le marché noir et à stabiliser les taux de change.
Mesures gouvernementales pour lutter contre le marché noir des devises
Face à la flambée des devises sur le marché parallèle, le gouvernement algérien a mis en place plusieurs mesures pour renforcer les circuits officiels et réduire la dépendance au cash. Parmi ces mesures figurent l’obligation d’effectuer certaines transactions via des moyens scripturaux, l’exonération des droits de douane et de TVA pour l’importation et le montage de terminaux de paiement électronique (TPE), ainsi que la promotion des paiements mobiles .
De plus, l’Algérie a inauguré ses premiers bureaux de change officiels, notamment au port d’Alger, pour fournir des services de change aux voyageurs et canaliser les transactions de devises dans un cadre régulé . Ces initiatives visent à offrir des alternatives compétitives et fiables au marché noir.
Perspectives et recommandations pour une stabilisation durable
Pour stabiliser durablement le marché des devises, il est essentiel que les autorités algériennes mettent en œuvre les mesures annoncées de manière efficace et transparente. Cela inclut l’application rapide de l’allocation touristique, le renforcement des bureaux de change officiels et la lutte contre le blanchiment d’argent. Par ailleurs, des réformes structurelles visant à diversifier l’économie et à réduire la dépendance aux hydrocarbures sont nécessaires pour renforcer la résilience du dinar face aux chocs externes .
En somme, la flambée de l’euro sur le marché noir en Algérie est le résultat de facteurs multiples, mêlant besoins légitimes en devises et pratiques illégales. Une réponse coordonnée et déterminée des autorités est indispensable pour rétablir la confiance dans le système financier et assurer la stabilité économique du pays.