Les échanges agroalimentaires entre la France et l’Algérie connaissent actuellement des perturbations majeures. Récemment, suite à des contraintes sur l’exportation de blé, les autorités algériennes ont pris des mesures qui impactent directement l’exportation de bovins français. Cette situation affecte gravement les producteurs français de jeunes bovins, appelés broutards, qui sont traditionnellement vendus en Algérie pour y être engraissés et abattus.
Depuis quelques semaines, l’exportation de ces broutards vers l’Algérie est complètement arrêtée, comme le rapporte Le Progrès dans son édition du 26 mai 2025. La France, qui est le principal exportateur de ces jeunes bovins vers l’Algérie, voit ainsi un de ses marchés les plus importants se fermer brusquement.
Cette suspension est le résultat d’un changement de politique commerciale de la part des autorités algériennes. En effet, depuis mi-avril 2025, la direction générale algérienne des services vétérinaires a arrêté de fournir les certificats sanitaires nécessaires pour l’importation de ces animaux. Cette décision n’a pas été officiellement annoncée mais s’est imposée de manière progressive, entravant considérablement les échanges entre les deux pays.
Des tensions croissantes dans les relations commerciales
Cette affaire est le dernier chapitre d’une série de tensions commerciales entre les deux nations. En septembre 2023, l’Algérie avait déjà suspendu les importations de blé dur français, invoquant des problèmes de qualité et des différences de prix. Cela avait déjà représenté un coup dur pour les exportateurs français de céréales, la France étant un des principaux fournisseurs de l’Algérie dans ce domaine.
Ces mesures protectionnistes peuvent être interprétées comme une tentative de l’Algérie de renforcer son autonomie alimentaire et de soutenir sa production locale. Les éleveurs algériens, qui se sentent parfois lésés par une concurrence étrangère, ont réclamé à plusieurs reprises des restrictions sur les importations pour favoriser l’élevage national.
Impact sur le secteur bovin français
Chaque année, la France exporte environ 1,3 million de broutards, et près de 20 % de ces exportations étaient destinées au marché algérien. L’arrêt soudain de ces flux vers l’Algérie a obligé les producteurs à rediriger plusieurs lots de bovins vers d’autres marchés tels que l’Italie, l’Espagne ou la Turquie, souvent à des conditions moins rémunératrices.
Cette situation a provoqué des réactions de mécontentement parmi les éleveurs français, particulièrement dans des régions d’élevage intensif comme la Bretagne, la Nouvelle-Aquitaine et l’Auvergne-Rhône-Alpes. Environ 90 000 broutards avaient déjà été exportés vers l’Algérie jusqu’en mars 2025, sur une prévision annuelle de 220 000 têtes. Les syndicats agricoles, tels que la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs, appellent à une intervention urgente du ministère français de l’Agriculture pour apporter un soutien aux professionnels affectés.
En plus des pertes financières, le stockage prolongé des animaux non exportés pose des défis en termes de coûts et de logistique. La pression sur les exploitations augmente, dans un contexte déjà difficile marqué par la hausse des coûts de l’alimentation animale et de l’énergie. Face à cette incertitude, les opérateurs français sont en quête de diversification de leurs marchés d’exportation, en explorant des opportunités au Moyen-Orient, en Asie du Sud-Est, et même dans certains pays européens, bien que ces nouveaux marchés requièrent souvent des ajustements logistiques et sanitaires considérables.